En Guinée, le temps semble suspendu sur les chantiers de nos grands stades. Les grues rouillées et les travaux interminables du stade 28 septembre et du stade Général Lansana Conté témoignent d’un pays incapable de fournir à sa jeunesse les infrastructures sportives qu’elle mérite.
Ces symboles d’un espoir abandonné privent non seulement nos sportifs de conditions dignes, mais également nos supporters de cette communion essentielle avec leurs équipes.
À l’heure où d’autres nations se surpassent pour accueillir les compétitions les plus prestigieuses, la Guinée, forte de ses ressources naturelles abondantes, n’arrive pas à achever des travaux promis depuis des années. Des annonces avaient été faites sur une éventuelle mise à disposition du stade 28 septembre pour le match Guinée-Somalie, mais elles se sont évanouies face à la réalité : le stade n’est pas prêt, les promesses restent creuses, et le Syli national est une fois de plus contraint de recevoir « à domicile » à Abidjan.
Quelles sont les conséquences de cette incapacité chronique ? Elles sont multiples et profondément douloureuses. D’abord, l’élimination sportive. Jouer loin de son public, c’est abandonner cet avantage psychologique inestimable que procure le soutien d’une foule en délire. Chaque cri de supporter, chaque battement de tambour, chaque drapeau brandi représente une force qui transcende le terrain. Privés de ce soutien, nos équipes partent désavantagées, enchaînant contre-performances et déceptions.
Ensuite, il y a le lien brisé entre les supporters et leurs équipes. Le football n’est pas qu’un sport, c’est une passion partagée, un facteur de cohésion sociale et une source de fierté nationale. Jouer loin de ses terres, c’est couper le fil qui relie un peuple à son équipe, c’est éloigner des générations de jeunes du rêve de vivre un jour l’ivresse d’un match historique dans leur propre pays.
Enfin, il y a la question de l’image nationale. La Guinée s’apprête à célébrer le 67ᵉ anniversaire de son indépendance le 02 octobre prochain, mais ce manque d’infrastructures sportives ne fait qu’accentuer une impression d’immobilisme et de négligence. Comment un pays riche en bauxite, en fer, en or, bref, béni par la nature, peut-il ne pas offrir à sa jeunesse des infrastructures sportives dignes de ce nom ?
La vérité est amère, et les responsabilités, bien qu’éparpillées, sont immenses. À qui la faute ? À chacun de réfléchir. Ce que nous savons, c’est que l’honneur d’une nation au 21e siècle passe aussi par ses terrains de sport. Et pour l’instant, nos stades vides et nos matchs délocalisés ne nous honorent pas. Il est grand temps de mettre fin à cet éternel match d’attente et de rendre à notre jeunesse les terrains où elle pourra rêver, vibrer, et triompher.
Hamidou Bangoura (Kibola), journaliste sportif et Administrateur d’Africasport.org